Si l’élection demeure dans les régimes démocratiques le mode « ultime » d’expression, les sondages occupent désormais une position centrale dans la vie politique et publique. Au point de modifier la nature de ces régimes. Les politologues parlent souvent de « démocratie d’opinion » pour caractériser la mutation opérée, solution permettant selon eux de restituer la parole aux « peuples ».
Les sondages ont-ils cette « vertu » cardinale, et les autres qualités que leur attribuent ceux qui en vivent ? Poser ainsi la question revient déjà à y répondre, du moins en partie, mais il s’agira lors de cette intervention d’apporter des éléments concordant qui mettent à mal cette prétention. Comme celle, connexe, que leur imperfection n’est sinon marginale, en rien rédhibitoire car à « l’impossible nul n’est tenu ». Manière de dire que les sondages ne seraient, pour reprendre l’idéologie professionnelle journalistique, qu’une information comme une autre. En somme pourquoi faudrait-il que la critique scientifique s’en mêle ? Les raisons abondent en dépit de la destination finale que lui désignent nombre de commentateurs : le cimetière.

Richard Brousse est sociologue et directeur de l’Observatoire des sondages.
Publications :
- Avec Alain Garrigou : Manuel anti-sondages. La démocratie n’est pas à vendre !, La ville brûle, 2011
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Publié le 15 mars 2023